Pour le dernier week-end de ce cycle alpinisme hivernal, nous prenons la même route que lors du précédent week-end (La Grave), mais nous allons un peu plus haut jusqu’au col du Lautaret.
Auparavant dans la semaine, nous avons pu discuter en visio avec nos guides Jean-Marc et Baptiste O pour parler des conditions dégradées (températures élevées puis chutes de neige depuis une semaine), connaître les alternatives et ce qu’ils proposaient. Les cascades n’étant pas en condition - ou trop risquées pour un groupe - les guides nous proposent un week-end dédié à l’ascension en terrain mixte, couloirs de neige et rochers, progression en terrain montagne peu fréquenté.
Nous décidons également de scinder le groupe en deux sous-groupes, chacun accompagné par un guide et un encadrant, afin d’avoir accès à des couloirs plus étroits et favoriser la sécurité.
Après un briefing initial et un point sur le matériel avec les guides à l’auberge de Villar d’Arène, nous mettons donc le cap sur le col du Lautaret.
Samedi 19 février, groupe Baptiste O :
Au col du Lautaret, nous identifions au Sud notre objectif du jour : la Pyramide de Laurichard. Nous n’avons pas encore déterminé le couloir que nous emprunterons. Après une approche d’un peu moins de 2h en raquettes, nous sommes au pied de la pyramide, et nous voyons 3 possibilités. Nous nous lançons dans une ligne qui semble sympa et
assez évidente à tout le monde, avec un peu de défi, mais pas trop (il s'avérera plus tard qu’il s’agit de “L’or et le safran”, cotée AD+). Nous nous apercevons rapidement que la neige déposée dans le couloir est très meuble (du “sucre”). De fait, la progression est lente, un peu laborieuse et s’avère assez délicate à protéger : en effet le rocher bordant le couloir présente peu de fissures et est très fragile.
Les leaders des 3 cordées décrochent quelques pierres dangereuses malgré une grimpe précautionneuse.
La sortie au sommet se fait sur un rocher délité puis sur une crête de neige assez esthétique.
Nous redescendons par le bien nommé “Couloir des patinettes”, de façon efficace et rapide : à la ramasse sur les fesses. Nous parvenons à rentrer juste avant la nuit en profitant de belles couleurs.
Parmi les moments de bravoure, on peut citer Franck et Nicolas qui luttent 30 minutes immobiles dans des positions délicates pour éviter des chutes de pierre massives.
Samedi 19 février, groupe Jean-Marc :
Nous partageons le début de l’approche avec le groupe de Baptiste O, puis nous nous orientons à l’Est, vers l’arête des Clochettes.
Avec notre guide Jean Marc, nous avions décidé de nous rendre sur la pointe des Clochettes, petite arête ludique au-dessus du col du Lautaret, un peu plus à l’est que la pyramide Laurichard.
L’approche est plus courte, une heure pour arriver au pied des pentes d’attaque en mixte mélangeant herbe gelée, pierres et neige. Il n’y a pas d’itinéraire précis ni de topo, nous allons improviser ! Le temps plutôt chargé nous offre une belle ambiance dans ce versant assez austère.
Un petit raidillon escaladé rapidement nous permet d’accéder au pied d’un beau couloir de neige que nous choisirons de ne pas emprunter, préférant grimper plus à gauche.
Antoine, assuré par Jean Marc prend la tête et s’engage dans un dièdre raide offrant quelques beaux mouvements d’escalade. Le terrain nécessite toutefois de prendre beaucoup de précautions car il n’est pas très stable.
Les deux cordées suivantes, assurées par William et Amandine prennent un autre chemin, plus mixte mais nécessitant encore la pose régulière de protection. Dans les nombreuses fissures, nous trouvons de quoi installer nos coinceurs ou des sangles.
Parmi les moments forts : citons Amandine qui fait toutes les longueurs en tête, Antoine qui enchaîne en tête un passage d’escalade vertical de 5 mètres non protégeable sous l'œil vigilant de Jean-Marc, William et Alexandra…
La fin de l’arête nous fait déboucher sur un petit col plongeant sur le vallon de Combeynot que nous avions laissé plus tôt le matin.
La descente dans la neige ramollie se fait rapidement jusqu’au col du Lautaret après avoir fait des essais d’ancrage en neige avec ancre, piolets et pieux à neige. Nous profitons des dernières heures du jour pour débriefer notre journée bien remplie avec l’autre groupe.
Dimanche 20 février, groupe du guide Baptiste O :
Après une première journée plutôt intense dans des conditions de neige et rocher un peu dégradées, nous optons pour un jour 2 plus orienté vers la pédagogie. Nous suivons les traces du groupe de Jean-Marc la veille, vers les Clochettes. Le rocher est adapté pour s'entraîner à poser des protections diverses (coinceurs, friends, becquets, pitons), et les cordées peuvent pratiquer la corde tendue, la progression simultanée et tirer des longueurs dans les passages plus délicats.
Nous pouvons également tester les ancres à neige / deadman et diverses techniques de corps morts pour assurer la sécurité dans un terrain en neige, avant de descendre.
Parmi les performances du jour, citons Baptiste L qui sort en tête un passage vertical “bloc” à mains nues sur un rocher glacial; Franck et Nicolas qui progressent tout le long en simultané ou corde tendue avec une fluidité exemplaire; Thomas qui sort en tête une longueur de 30m avec un seul point de protection, et Audrey qui fait toute la journée ensoleillée sans lunettes de soleil…
Dimanche 20 février, groupe Jean-Marc :
Les Clochettes, on y revient toujours ! Nos compagnons de l’autre groupe nous ont un peu refroidi avec leur expérience de la veille à la Pyramide de Laurichard, décidément pas en conditions en cette saison: neige peu consistante, rocher mauvais et en ce moment non bloqué par la neige et la glace; bref, tout ce qu’il faut pour faire fuir un groupe en apprentissage (cette décision en faisant partie du reste).
Partant plus tôt que la veille nous remontons le vallon de Combeynot pour atteindre une arête qui se détache devant nous. Nous nous encordons à son pied et entamons l’escalade ponctuée d’un ressaut rocheux puis d’une esthétique arête de neige en haut de laquelle nous attend le soleil. La suite se déroule sur un rocher similaire à celui de la veille, nécessitant de l’attention et des pas de chat pour ne pas accélérer l’érosion.
Le choix de l’itinéraire est ici évident et se prête bien à l’apprentissage.
Amandine réalise encore une partie des longueurs en tête pour compléter son expérience et Antoine débouche en premier sur une antécime de l’arête, point à partir duquel nous entamons la redescente vers un endroit abrité du vent pour manger un morceau.
Nous retrouverons plus tard et plus bas l’autre groupe pour finir le cycle en débriefant nos expériences respectives autour de la table d’un bar au col du Lautaret.
Le cycle s’achève sur un superbe week-end - assez différent des week-ends cascade - pendant lequel tout le monde a pu découvrir de nouvelles pratiques, comprendre l’adaptation permanente nécessaire au terrain montagne, et aller chercher ses limites en toute sécurité.
Conclusion du cycle :
Ce cycle d’initiation à l’alpinisme hivernal s’est étalé sur 2 journées et 3 week-ends complets (soit un total de 8 journées). Les 10 participants ont pu découvrir le terrain montagne dans des conditions hivernales, couvrant un large spectre de situations : de l’approche en raquettes sur un terrain plat à la cascade de glace verticale, et un bon nombre de situations intermédiaires typiques.
Outre la grimpe en elle-même, nous avons également pu voir les conséquences de la préparation d’une sortie (topo itinéraire, météo etc.) sur son bon déroulement. Nous avons également pu apprendre beaucoup lors des phases de prises de décision par rapport aux facteurs extérieurs (essentiellement météo, mais aussi inertie du groupe, gestion du timing etc.)
Tout le monde a pu découvrir, s’initier et progresser en sécurité grâce à la vigilance des encadrants et des guides Oisans-Ecrins, et il ne fait aucun doute que les expériences intenses partagées ensemble resteront dans les mémoires pendant longtemps !
Tous les participants remercient Bruno pour l’énergie et le temps consacrés à l’organisation impeccable et la coordination de ce cycle très riche. Nous remercions également Nicolas et Alexandre présents comme encadrants sur la plupart des sorties, qui ont su apporter des conseils avisés et leur touche personnelle au groupe.